Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
                                                                       AMIS DES MOULINS 61

L’Etat souhaite évaluer les conséquences environnementales de ses recettes et de ses dépenses

30 Septembre 2019

A la demande du ministre de l’Economie, l’inspection des finances et le conseil général de l’environnement et du développement durable viennent de rendre un rapport visant à évaluer la compatibilité des budgets nationaux avec les objectifs environnementaux. La première étape consiste à recenser, au sein des budgets, les dépenses et les recettes ayant un impact environnemental « significatif » positif ou négatif dans le but ensuite, d’en évaluer précisément les effets. Rappelons également qu’en vertu de l’article 206 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, le gouvernement doit présenter en annexe du projet de loi de finances, un rapport intitulé « Financement de la transition écologique : les instruments économiques, fiscaux et budgétaires au service de l’environnement et du climat ».
Le rapport se penche à la fois sur les recettes et les dépenses ayant un impact significatif sur l’environnement. Elle constate que du côté des recettes, il y a un relatif consensus pour définir les taxes environnementales. Ce sont les taxes assises sur l’énergie, la pollution, les transports ou les ressources, dont elles font varier le coût relatif, ont un effet sur les comportements et représentaient en France en 2017 2,3 % du PIB, soit 53 Mds €.
En revanche, côté dépenses, la mission fait le constat d’un foisonnement de méthodes mais d’une absence de consensus.
La statistique publique calcule chaque année les dépenses de protection de l’environnement de l’ensemble des agents économiques (administrations publiques, entreprises et ménages) et identifie une part relative aux administrations publiques centrales (État et opérateurs), qui sont transmises à la Commission européenne. Sur le seul champ du budget de l’État, trois documents budgétaires (relatifs à la transition énergétique, la lutte contre le changement climatique et la protection de la nature et de l’environnement) sont produits annuellement et les dépenses éligibles à l’obligation assimilable du Trésor verte (OAT verte) sont recensées.
    La mission a distingué six axes environnementaux : lutte contre le changement climatique, adaptation au changement climatique, gestion durable des ressources en eau, transition vers une économie circulaire et prévention des risques, prévention de la pollution, préservation de la biodiversité et gestion durable des espaces naturels, agricoles et forestiers. Elle propose de classer chaque dépense sur chacun de ces six axes et de les coter de défavorable (catégorie -1) à très favorable (catégorie 3) sur chaque axe environnemental.
Pour parvenir à classer les dépenses, la mission a explicité un scénario de référence à partir duquel la classification est effectuée. Celui-ci a été choisi de façon à pouvoir discriminer les actions ayant les conséquences significativement différentes (favorables et défavorables) de la situation sans dépense. La mission s’est appuyée sur les documents budgétaires et sur les quelques études existantes pour estimer les impacts. À cette occasion elle a fait le constat d’un nombre limité d’outils d’évaluation établis sur des données à jour.
    La mission a ensuite appliqué sa méthode au projet de loi de finances 2019 sur un champ large comprenant quatre missions qui couvrent les actions de l’État dans les secteurs dont l’impact environnemental est le plus significatif (« Cohésion des territoires », « Agriculture, alimentation, pêche et sylviculture », « Écologie et mobilité durables », « Recherche et enseignement supérieur »).
Au total, la mission a comptabilisé 55Mds € de dépenses prévues en PLF 2019 non neutres : entre 33 et 36 Mds de dépenses (selon les options de classement proposées par la mission) sont classées au moins une fois favorables et environ 25 Mds € de dépenses au moins une fois défavorables, certaines dépenses (de 4 à 6 Mds € selon les options de classement proposées par la mission) pouvant se révéler à la fois favorables pour un objectif environnemental et défavorables à un autre. Les dépenses au moins une fois favorables en 2019 sont d’un montant globalement comparable aux recettes environnementales, estimées autour de 35 Mds € en 2017. La mission a recensé entre 26,0 et 28,6 Mds € de dépenses favorables à l’objectif d’atténuation du changement climatique et 17,5 Mds à 18,8 Mds € de dépenses défavorables. Il s’agit de l’objectif pour lequel la mission a comptabilisé les montants les plus importants, favorables comme défavorables.

Eurostat donne une définition de la taxe environnementale

Le règlement européen n° 691/2011 définit une taxe environnementale comme « une taxe dont l’assiette est une unité physique (ou une approximation d’une unité physique) de quelque chose qui a un impact négatif spécifique et avéré sur l’environnement, et qui est considérée comme une taxe par le système européen de comptes ». Il s’agit donc d’une définition par l’assiette qui repose sur une logique économique et comportementale : une taxe est qualifiée d’environnementale si elle envoie un «signal-prix » qui incite les acteurs économiques à adopter un comportement favorable à l’environnement, c’est-à-dire si elle conduit les acteurs à internaliser le coût collectif de leurs activités en augmentant le prix relatif des produits générant une externalité négative pour l’environnement. Selon cette définition, la fiscalité environnementale française atteignait 2,3 % du PIB en 2017 (52,9 Mds€) et 5,0 % des prélèvements obligatoires. Les principales taxes environnementales sont les suivantes : taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques (TICPE), contribution au service public de l’électricité (CSPE), taxes locales sur l’électricité, imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER), taxe sur certifications d’immatriculation (cartes grises), taxe additionnelle sur les assurances automobiles, taxe due par les concessionnaires d’autoroute, taxe sur les véhicules de société, taxe de l’aviation civile, redevances pollution-eau, taxe générale sur les activités polluantes, redevances prélèvement eau.

La difficile identification des dépenses : la mission propose d’identifier cinq catégories de dépenses

Concernant les dépenses, la mission a fait les constats suivants :
-l’environnement ne peut pas se résumer à un seul objectif et à une seule métrique  : une dépense peut ainsi être favorable à la lutte contre le changement climatique, mais générer un effet externe négatif sur la protection des espaces naturels ou sur le bruit (exemple : la création d’une infrastructure nouvelle de transports ferroviaires) ;
 - il existe une gradation dans les effets favorables : certaines dépenses financent directement la production d’un service environnemental, d’autres ne poursuivent pas un objectif environnemental directement, mais ont un impact favorable indirect en réduisant une ou des pressions environnementales. Enfin, certaines dépenses sont favorables à court terme mais ont des effets controversés à long terme, par exemple parce qu’elles permettent de réduire immédiatement les pressions environnementales, mais incitent à conserver des technologies qui ne sont pas compatibles avec les objectifs de long terme (risque de verrouillage technologique –lock-in) ;
 - une même dépense peut concourir à plusieurs objectifs : à
titre d’exemple, une mesure réduisant la pollution pourra être en général également favorable à la biodiversité en restaurant les habitats naturels.
Compte tenu de ces constats, la mission propose de classer chaque dépense dans une des cinq catégories identifiées pour chaque objectif environnemental :
-    catégorie 3 : effet très favorable ou direct . La dépense correspond à une production de biens ou services environnementaux ou à un objectif environnemental principal, à court et long terme ;
-    catégorie 2 : effet favorable indirect. La dépense n’a pas comme objectif principal l’environnement mais contribue indirectement et de façon significative à la réalisation des objectifs ;
-    catégorie 1 : effet favorable mais controversé. La dépense contribue par exemple à réduire une pression environnementale à court terme, mais il existe une controverse scientifique ou des effets en sens inverse à long terme, en particulier des risques de verrouillage technologique (lock-in). À titre d’exemple, les dépenses de soutien aux biocarburants entrent dans cette catégorie : les biocarburants permettent incontestablement de réduire les émissions de gaz à effets de serre, mais sont incorporés à des carburants conventionnels, ce qui incite à long terme à conserver une technologie thermique utilisant une énergie fossile ;
-    catégorie 0 : Cette catégorie regroupe deux types de dépenses de nature différente : les dépenses dont l’impact est jugé neutre et les dépenses pour lesquelles la mission n’a pas été en mesure de déterminer un impact environnemental significatif, faute de donnée disponible ;
-catégorie -1 : dépenses défavorables c’est-à-dire qui constituent une pression environnementale directe ou qui incitent à des comportements défavorables à l’objectif environnemental.

Green Budgeting : proposition de méthode pour une budgétisation environnementale, septembre 2019 (http://www.igf.finances.gouv.fr/files/live/sites/igf/files/contributed/IGF%20internet/2.RapportsPublics/2019/2019-M-015-03_Green%20Budgeting.pdf
AJDD 29 septembre 2019
 
 
L’Etat souhaite évaluer les conséquences environnementales de ses recettes et de ses dépenses
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article